La Responsabilité Sociale des Entreprises et les institutions Le cas de l’Inde

, par Agnès Leroy

 Introduction

En Inde, la responsabilité des entreprises est devenue un enjeu majeur. Une loi, la « Companies Bill » adoptée en août 2013 par le Parlement de Delhi est effective depuis avril 2014. Elle oblige les grandes entreprises indiennes à consacrer 2 % de leurs bénéfices nets à des projets de Responsabilité Sociale et Environnementale. Le versement est examiné à la fin de chaque année fiscale par le directeur du comité Responsabilité Sociale Environnementale qui doit s’assurer du respect de la loi.

Elle s’applique aux sociétés dont la valeur nette atteint 5 milliards de roupies, celles dont le chiffre d’affaires est d’au moins 10 milliards de roupies, ou bien celles dont le bénéfice net dépasse 50 millions de roupies. En comparaison avec la France, cela concerne les entreprises ayant une taille au moins équivalente à celle d’une Entreprise de Taille Intermédiaire (ETI). Cela devrait regrouper in fine entre 8 000 et 16 000 entreprises indiennes (The Guardian, August 2014). L’Inde est un des premiers pays au monde à fixer un minimum obligatoire concernant les dépenses de Responsabilité Sociétale des Entreprises des entreprises.

Les institutions

Pour D. NORTH (1990, 2005), « Les institutions forment les règles du jeu dans une société ou, plus formellement, elles sont les contraintes conçues par l’homme qui façonnent l’interaction humaine. Par conséquent, elles structurent les incitations à l’échange humain, que celui-ci soit politique, social ou économique ». Il distingue deux types d’institutions : d’une part les institutions formelles qui sont le produit intentionnel des individus, des « échafaudages » construits dans le but de réduire l’incertitude ; d’autre part, les institutions informelles qui sont en fait le produit des coutumes et des croyances des individus, fermement ancrées dans la culture, et très lentes à évoluer.

Le terme institution a été fortement influencé par la pensée de DURKHEIM, qui décrit un processus spécifique d’intégration des normes, des croyances et des modes de conduite orientée vers une finalité particulière ; et le produit d’une histoire collective où les actions individuelles agrégées entre elles ne sont pas forcément prévisibles. Il est d’ailleurs difficile de prévoir l’évolution d’une institution.

Les institutions peuvent être complémentaires et/ou s’imbriquer les unes par rapport aux autres. C’est aussi un régulateur des rapports sociaux comme c’est le cas par exemple avec l’État.

Une institution n’est donc pas une structure acquise, figée avec une réponse univoque en réponse à une demande sociale mais une entité « vivante » en constante évolution. Elle peut avoir des raisons légitimes ou illégitimes d’agir, y compris à partir de justifications officielles.

Cela peut donc être une famille, un village, une organisation internationale, un État, une entreprise, etc. L’institution « suprême » étant l’Humanité. Les institutions existent donc à l’échelle planétaire et non plus seulement au niveau local ou national (HELD, 2004 ; RENAUT, 2013).

La culture joue également une place centrale dans l’analyse des institutions. En effet, selon Marcel MAUSS et Paul FAUCONNET, les institutions « renvoient à des manières d’agir ou de penser […] que la société impose aux individus » [1]. Par ailleurs, elle produit des phénomènes institutionnels dont les causes, moyens et conséquences sont parfois difficilement identifiables de par la complexité des relations en leur sein, elles-mêmes s’insérant dans un ensemble plus vaste. Elle contribue de manière perpétuelle à l’évolution des structures sociales (Pierre FABRE, 2005).

Les institutions internationales, compte-tenu de leurs modes d’action, jouent un rôle important concernant la responsabilité des entreprises ; et ce d’autant plus que nous vivons dans un contexte mondialisé. Les relations entre les institutions locales, nationales et internationales peuvent être complexes mais elles sont complémentaires les unes par rapport aux autres. Selon Karl POLANYI, une institution s’insère dans un système économique et historique où elle est encastrée dans la société. Les institutions sont donc bien plus vastes qu’un ensemble de contrats entres des agents économiques tel que l’indiquait WILLIAMSON.

Institution et organisation

Selon SELZNICK [2], une organisation est un moyen, un simple instrument technique orienté vers une finalité certaine dans un contexte d’efficience mettant en avant l’étude de la hiérarchie, de la coordination, de la coopération. Les institutions n’ont pas nécessairement une fin déterminée et forment « le réceptacle de l’idéalisme du groupe » en ayant une dimension naturelle. La notion d’institution serait donc plus large que l’organisation même si ces deux notions s’enchevêtrent parfois. Une organisation est une entité capable d’être et d’agir comme un ensemble d’éléments en interaction, composé d’individus, regroupé comme une structure pilotée pour atteindre des objectifs opérationnels tactiques et/ou stratégiques, ayant un système de communication pour faire circuler l’information, afin de répondre à des besoins en optimisant ses ressources.

Contrairement à une définition matérialiste des institutions qui sont considérées uniquement comme des parlements, des bureaucraties, des armées et des systèmes de partis, les « nouveaux courants néo-institutionnalistes » ont pris en compte les jeux politiques, la production de normes, de valeurs, des cadres culturels, etc. Les institutions font donc partie de la vie sociale, économique et politique (LECOURS, 2002).

La Responsabilité Sociale des Entreprises

Selon Patricia CRIFO (Professeur des Universités, Université Paris Nanterre, École Polytechnique), « la RSE de manière générale consiste à faire « davantage que la contrainte règlementaire » (Conférence RSE, Université Paris Dauphine, 2016).

Elle peut aussi se définir comme étant la manière dont les entreprises peuvent intégrer, sur une base volontaire ou adaptative des préoccupations environnementales, sociales et sociétales. Elles interagissent avec l’ensemble des parties prenantes, qu’elles soient internes (dirigeants, salariés, actionnaires…) ou externes (fournisseurs, clients, ONG, État…).

Historiquement, en Occident, ce sont les entreprises américaines qui ont été les premières à se préoccuper de la RSE. Selon CAPRON, il en résulte que l’on peut distinguer trois grandes conceptions du concept de RSE :

  • Une conception d’ordre éthique qui trouve ses racines dans le paternalisme d’entreprise : elle se manifeste de manière exclusivement volontaire, essentiellement à travers des actions philanthropiques et de mécénat.
  • Une conception stratégique utilitariste qui met en avant le lien supposé positif entre la performance sociale de l’entreprise et sa performance économique.
  • Une conception politique de « soutenabilité » qui met l’accent sur l’encastrement de l’entreprise dans la société et sur sa nécessaire contribution au bien commun ; les actions visent plutôt l’anticipation et la prévention que la réparation.

Le « World Business Council for Sustainable Development » définit la RSE comme le résultat continu réalisé par les entreprises pour contribuer au développement économique tandis que cela améliore la qualité de vie des travailleurs et de leurs familles ainsi que de l’ensemble des communautés et de la société toute entière (WBCSDW [3], 2001).

Si le terme de « Responsabilité Sociale de l’Entreprise » (« Corporate Social Responsability ») est relativement nouveau en Inde, à l’inverse, le fait que les entreprises soient responsables envers les citoyens n’est pas nouveau. Les entreprises indiennes ont une tradition philanthropique de longue date portée notamment par des philosophes indiens prêchant pour des principes éthiques dans le business. Il existe donc réellement une RSE engageant les organisations sur le long terme (LEMERCIER, 2009 ; KPMG, 2008).

« On assiste à un alignement de planètes sans précédent pour faire de la performance environnementale et sociétale autre chose qu’un simple devoir de transparence » (GILLET-GOINARD, 2015).

Selon les entreprises, il existe donc une grande variété de degré d’implication dans la RSE. Il est à noter qu’une entreprise peut pratiquer plusieurs types de RSE et que la frontière pour identifier un certain type de RSE n’est pas toujours claire.

À travers cet article, nous nous interrogerons donc sur la capacité des institutions à mettre en place la Responsabilité Sociale des Entreprises afin notamment de réduire les inégalités prégnantes en Inde.

Pour répondre à cette problématique, nous verrons dans une première partie quels sont les enjeux de la Responsabilité Sociale en Inde en étudiant les contraintes institutionnelles ; puis, dans un second temps, nous montrerons que les institutions sont le socle en devenir de la responsabilité sociale des entreprises en Inde où l’État a un rôle régulateur à jouer ; pour enfin indiquer que l’environnement n’est pas forcément déterminant dans la forme de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise.

 1. Les enjeux de la Responsabilité Sociale des entreprises en Inde et les contraintes institutionnelles

1.1 La Responsabilité Sociale de l’entreprise : une nécessité ?

L’encadrement légal en Inde de la responsabilité sociale des entreprises impose aux entreprises des actions philanthropiques. Néanmoins, les entreprises restent libres de choisir quelles actions elles souhaitent mener et la manière dont elles le feront.

L’Inde bénéficie d’une forte croissance économique mais d’une pauvreté structurelle couplée avec une société très inégalitaire. L’Inde fait partie des pays où entre 50 et 75 % de la population vit dans une pauvreté considérée comme multidimensionnelle. Le coefficient de Gini en Inde est de 0,34 (Banque Mondiale, 2009) ce qui montre l’existence d’inégalités relativement importantes, mais cette donnée chiffrée est à nuancer du fait de la difficulté d’obtenir des données fiables et récentes pour ce pays. Par ailleurs, la situation est très différente selon les vingt-neuf États Indiens.

L’implémentation de la RSE, favorisée par le pouvoir politique semblerait donc être une nécessité car cela permettrait d’augmenter les dépenses dans des secteurs cruciaux afin de réduire les inégalités, en particulier pour les plus pauvres puisque 270 millions d’Indiens vivent avec moins de 1,25 $/jour (PPA) ce qui représenterait 30 % de la population (OCDE, 2014).

L’État indien a d’ailleurs tout intérêt à favoriser la participation des entreprises au marché de la RSE afin de contribuer à la réduction des inégalités et de la pauvreté puisque certains dysfonctionnements du système l’empêchent de mener, de manière optimale, notamment ses missions régaliennes.

Par ailleurs, la situation inégalitaire de l’Inde est notamment entretenue par un système fiscal quasi inexistant ou peu efficace. En effet, le niveau de prélèvement fiscal est particulièrement bas et l’administration fonctionne de manière « archaïque ».

  • La RSE pour réduire les déséquilibres en termes d’emploi

L’Inde, a un secteur informel très important qui représente près de 92 % de l’emploi en Inde. En termes de valeur ajoutée produite, les revenus sont généralement très faibles dans ce secteur alors que la majorité des indiens y ont un emploi.

Les entreprises appartenant au secteur informel sont surtout des très petites entreprises et elles le restent la plupart du temps (NAUDET, 1997).

L’existence d’un (ou plusieurs) secteur(s) informel(s) donne une configuration très particulière au marché du travail (DE VREYER & ROUBAUD, 2013). Il apparaît clairement que l’accès à l’emploi est largement conditionné par les relations personnelles, la culture et les réseaux dont disposent les individus. Les comportements des individus en Inde sont donc largement modelés par les institutions qui y prévalent avec les règles du jeu formelles et informelles, normes sociales, etc. Pousser les entreprises à investir dans la responsabilité sociale de l’entreprise, c’est aussi permettre à certaines d’entre elles d’investir dans des programmes promouvant l’éducation des filles dès l’enfance afin de permettre une diminution de ces inégalités qui se répercutent inévitablement au niveau de marché du travail en particulier dans le milieu rural même si les résultats diffèrent en fonction des pays et des États en Inde.

Sur les 29 États Indiens, certains sont plus inégalitaires que d’autres notamment quant à la participation des femmes au travail comme le montre le graphique ci-dessous.

Source : Études Économiques de l’OCDE, Inde, Novembre 2014

À travers ces données, il apparaît que l’inégalité hommes-femmes est importante puisque 54 % d’hommes sont comptabilisés en tant qu’actifs contre 30 % pour les femmes selon la Banque Mondiale. Cela implique que seulement 125 millions des 380 millions de femmes en âge de travailler recherchent un travail ou travaillent officiellement.

Dans ce domaine, l’Inde a donc des progrès à effectuer en termes d’investissement sociétal pour favoriser l’équité entre les hommes et les femmes (World Economic Forum, 2014). La participation des femmes à l’activité économique demeure donc exceptionnellement faible ce qui empêche la progression des revenus et engendre de graves inégalités hommes-femmes.

Favoriser la responsabilité sociale des entreprises en Inde permettrait donc d’aider les femmes à sortir d’une situation précaire et donc de créer un cercle vertueux au sein de la société indienne.

  • La RSE et le développement sociétal

La RSE selon une étude de LUO, XUEMING et BHATTACHARYA (2006), favorise les activités philanthropiques ce qui améliore les performances financières des entreprises puisque les clients apprécient acheter des produits fabriqués par une entreprise éthique. Par ailleurs, les salariés se sentent plus impliqués dans un groupe qui a des valeurs responsables au service de la société.

Des programmes volontaires en faveur de la RSE utilisant l’ensemble des ressources de l’organisation disponibles pour aider au développement sociétal sont créés en favorisant de la synergie qui peut être utile pour les firmes et pour la société. Cela crée donc une relation gagnant-gagnant (PORTER et KRAMER, 2011). La mise en place de la RSE au sein des entreprises indiennes ne peut donc être que bénéfique pour atteindre un modèle économique soutenable pour la firme en elle-même et l’ensemble des agents économiques d’un bout à l’autre de la chaîne de valeur.

1.2 Des contraintes institutionnelles à surmonter

  • Le système de castes Le terme a été introduit par les Portugais au XVe siècle pour décrire la hiérarchisation importante de la société indienne.

Ce système de caste Varna (couleur) part du principe que les hommes naissent et demeurent inégaux. Ce système se base sur l’ancienne littérature hindoue et classe les Indiens en quatre grandes catégories qui puisent leurs origines de la société Védique. On trouve au sommet de cette hiérarchie, les brahmanes (prêtres), suivis par les kshatriyas (guerriers) puis les vaishyas (commerçants) et enfin au bas de l’échelle sociale les sudra. Ceux qui n’entrent dans aucune de ces catégories sont les intouchables ou Dalits. L’Inde, avec son décollage économique n’a pas vu ce système disparaître, au contraire puisqu’il s’est adapté aux différentes périodes (JAFFRELOT, 2005b). Les castes sont un facteur stratifiant la société indienne socialement et économiquement et qui reste très ancré culturellement surtout dans les milieux ruraux reproduisant de la discrimination défavorable au développement (PREVOT, 2014). L’Inde est donc plurielle.

Le défi le plus considérable, souvent mal compris en Occident, est donc lié à l’héritage du système de castes, auquel s’ajoute le risque d’affrontements identitaires entre la majorité hindoue et la minorité musulmane (14 % de la population, 180 millions de personnes pour 1,2 milliard d’habitants), actuellement attisés par le parti nationaliste hindou, Bharatiya Janata Party (BJP, au pouvoir de 1998 à 2004, puis de nouveau depuis 2014).

Le système de caste est donc encore influant dans le mode de fonctionnement économique et social en Inde. Selon une étude de l’OCDE, « en 2014, 11,4 % seulement de la population âgée de 25 à 64 ans possède un diplôme d’études supérieures, soit un niveau inférieur à celui des autres économies non membres de l’OCDE.

Ce pays inégalitaire, où les discriminations sont ancrées dans la culture indienne, est donc compliqué à faire évoluer sur le plan des mentalités. Cela peut d’ailleurs selon PIKETTY (2016) « dégénérer à tout moment en tensions violentes ».

  • Des institutions corrompues impliquant l’ensemble des acteurs

La corruption peut se définir comme l’accaparement privé des ressources ou d’actifs publics. Elle est souvent généralisée dans les pays en développement. En Inde, la corruption est loin d’être limitée à la justice ou à la police. Elle s’étend à tous les secteurs de l’économie tels que la santé, l’enseignement (de SARDAN, 2001).

Dans la plupart des pays en développement, la corruption « fait système » et entretient le pays dans un mode de fonctionnement devenu normal (CARTIER BRESSON, 1992).

Les réformes économiques et sociales ont été et sont minées par la corruption. Les citoyens indiens sont pour la plupart conscients du mode de fonctionnement de leur démocratie puisqu’entre 2004 et 2014, une vingtaine d’affaires a conduit à l’inculpation de membres du gouvernement.

Beaucoup de scandales ont éclaté depuis 2010 comme le 2G Spectrum scam, le Commonwealth Games 2010 scam, Adarsh Housing Society scam, ou le Coal mining Scam and Cash pour les votes qui ont impliqué le gouvernement au plus haut niveau puisque des ministres ont été accusés. L’Inde est encore un pays où la corruption occupe une place importante puisque le pays est placé à la 76e place sur 168 selon Transparency International (2015). Dans un tel environnement social et légal, il semble que la mise en place de lois, aussi légitimes qu’elles soient, semble compliquée aussi bien au niveau local que national.

Comme le note A. SEN (2005), la démocratie est devenue « l’option par défaut », même si elle se réduit souvent à des procédures électorales formelles.

Pour la lutte contre la pauvreté, la démocratie est un puissant moyen de faire entendre les besoins ou intérêts des pauvres, que le marché ne traduit pas forcément. Pour une mise en place optimale de la RSE en Inde, l’ensemble des institutions doivent donc s’impliquer dans ce processus.

  • La problématique autour de l’instruction

L’écart le plus important concerne l’éducation malgré l’adoption en 2009 du Right to Education (RTE) qui rend l’école obligatoire « d’une manière satisfaisante et équitable dans des écoles formelles qui satisfont un minimum de normes et de standards ». L’application de cette mesure est cependant très contrastée en fonction des États et est liée au système de castes. Par exemple, les 2/3 des analphabètes sont concentrés dans six États principalement situés dans le nord du pays. Selon le sondage PISA effectué en 2009, l’Inde figure en bas de ce classement parmi les 74 pays ou économies pris en compte. L’Inde n’a donc pas une éducation de qualité ce qui, selon des études récentes montrent que cela peut freiner son développement (DREZE, SEN, 2014).

Par ailleurs, malgré un niveau d’instruction élevé, les femmes sont victimes de discrimination. Même si ces inégalités semblent légèrement diminuer entre 2000 et 2012, le taux de chômage des femmes ayant fait des études supérieures en zones rurales atteint respectivement 20 % en zone rurale et 13 % en zones urbaines sachant qu’au niveau national le taux de chômage est de 6 % (hommes et femmes compris).

Les institutions sociales en Inde ont d’ailleurs tendance à renforcer certaines inégalités. L’Inde est mal placée au regard de l’indice des institutions sociales et de l’égalité homme-femme (ISE) de l’Organisation de Coopération et de Développement Économique ; et de l’indice de la Banque mondiale sur la gouvernance.

  • La question de l’accès au pouvoir

Il existe également une problématique autour des partis politiques détenant le pouvoir en Inde et leur mode d’accès à ce dernier. Par exemple, Narendra MODI est devenu premier ministre en grande partie grâce à l’électorat de la classe moyenne. Il a également eu une grande capacité à utiliser les médias (télévision, Internet, réseaux sociaux…) et à saturer l’espace public avec une communication très performante. Son lien avec les milieux d’affaires, notamment avec les dirigeants de groupe de presse est également notable. Même, si la liberté de la presse existe en Inde, elle est relative.

La mise en place d’une responsabilité sociale des entreprises peut-être une réelle opportunité d’améliorer le développement du pays en prenant en compte son contexte singulier.

 2. Les institutions, socle en devenir de la Responsabilité Sociale des Entreprises en Inde

2.1 Les institutions forment un système pour développer la Responsabilité Sociale des entreprises en Inde

NORTH (2005) a montré que l’évolution des institutions est un processus compliqué et endogène, parce que contrairement aux changements naturels, il est en partie intentionnel. Il dépend de croyances partagées, des idées que les hommes se font sur les changements possibles et des résultats à attendre de modifications des institutions.

Les sociétés qui ont réussi à accéder à des niveaux de vie élevés pour l’ensemble de la population ont connu une vaste transformation de leurs institutions, notamment dans le domaine du politique et de l’administration publique. Les institutions ne peuvent donc pas être considérées individuellement mais comme un système global où chaque institution est complémentaire l’une de l’autre (VOIGT, 2013).

Les institutions peuvent influencer les individus par rapport à leur comportement individuel, eux-mêmes ayant des relations avec les institutions formelles comme le montre le schéma ci-dessous (NORTH, 1990 ; EGGERSTON, 1996 ; ROLAND, 2004 ; ROUGIER, 2015).

Source : ROUGIER Eric (2015) « The parts and the whole » : Unbundling and rebundling systems and their effect on economic development, Cahier du GREThA, n° 2015-12.

Chaque pays a des spécificités, une ou des cultures qui lui sont propres. La mise en place d’une responsabilité sociale et environnementale doit donc en tenir compte. Mais il n’existe pas « des lois universelles de la performance » (MARTINET, PAYAUD, 2013). Les capabilités propres à la vie humaine en Inde (SEN, 2010) dépendent notamment des institutions locales avec leurs singularités au niveau économique, mais aussi social, sociétal et environnemental (CAPPELLETTI, 2006) afin d’aboutir à la performance globale.

  • Le rôle des firmes

Les Grandes entreprises (Firmes Multinationales) telles que Hindustan Unilever, la branche indienne du groupe anglo-néerlandais, s’impliquent dans des démarches de RSE en annonçant des investissements de 100 millions d’euros d’ici 2019 en faveur de l’accès aux sanitaires dans le pays. Par ailleurs, le groupe agit auprès de fermiers indiens pour les aider à mettre en place des pratiques agricoles soutenables tout en leur permettant d’être compétitifs.

Outre les groupes indiens (nouvelles technologies : Infosys, TCS ou Wipro par exemple), l’Inde attire les plus grandes multinationales du secteur. Ces multinationales sont des agents économiques à prendre en compte pour mettre en place la RSE en Inde puisqu’en termes de RSE, elles ont souvent des stratégies réactives ou proactives. De nombreuses firmes multinationales du secteur sont présentes en Inde comme IBM, Accenture ou Cap Gemini qui y totalisent plus de la moitié de leurs effectifs. Dans le secteur du textile, les entreprises indiennes occupent également une place importante puisqu’elles emploient 45 millions de personnes (dont un demi-million d’enfants), soit 4 % du PIB indien.

La diminution des inégalités à travers certaines institutions en mettant en place une politique RSE est donc possible.

Par exemple, un État, le « Tamil Nadu » fait déjà preuve d’initiatives et d’innovations dans les domaines de la santé et de l’éducation en proposant notamment un large éventail de soins médicaux gratuits et universels. Selon les dernières études, cet État a de biens meilleurs résultats que les autres États indiens concernant l’espérance de vie, le nombre d’enfants vaccinés, en termes de développement. Outre les programmes sociaux développés par cet État, une loi a été votée garantissant l’emploi rural entrainant un taux d’emploi parmi les plus élevés du pays. La corruption est dans cet État relativement réduit comparée aux autres. L’action politique et démocratique a donc été efficace en renforçant la capabilité humaine.

L’État qui possède un pouvoir politique décentralisé en Inde doit également faire évoluer les structures sociopolitiques prévalentes des régions les « moins favorisées ».

Dani RODRIK (2003) indique qu’il est possible de permettre une augmentation du revenu moyen en dépit de corruption si des institutions relais prennent une place importante en se substituant au rôle de l’État. Les entreprises privées et les ONG ont donc un rôle à jouer pour tenter de faire diminuer la pauvreté en Inde en développant des programmes en faveur de l’éducation, de la santé, etc.

2.2 Le marché de la responsabilité sociale des entreprises nécessite de la régulation

La responsabilité sociale des entreprises est une forme de marché où l’on trouve du côté des demandeurs les citoyens et du côté des offreurs notamment les entreprises, l’État, les Organisations Non Gouvernementales, etc. En effet, l’ensemble des institutions offrent une responsabilité pour répondre à une demande sociale. (BHUKUTH, BALLET, 2014).

Tous les agents économiques ne jouent pas le même rôle sur ce marché. Par exemple, les agences d’évaluation ou les ONG peuvent fournir de l’information tandis que d’autres régulent le marché pour qu’il soit vertueux.

Mettre en place une politique de RSE performante passe aussi par la prise en compte du système fiscal indien. Or, le taux de prélèvements obligatoires en Inde est très faible aussi bien pour les ménages que pour les entreprises. Même si l’Inde souhaite mettre en place un système d’allocations conditionnelles reposant sur le fait qu’il est possible de verser de l’argent à condition que le bénéficiaire ait un comportement constructif, ces systèmes d’allocation doivent, pour être optimaux complétés par d’autres éléments.

Avec la libéralisation des marchés financiers, les institutions financières sont fragiles. Les projets risqués financés par emprunt sont nombreux et les prêts sont parfois accordés davantage en fonction des relations personnelles de l’emprunteur que sur la base de la rentabilité attendue. La manière dont sont gérées les entreprises peut être opaque et le cadre juridique est globalement déficient (LANDY F., Gouvernance verticale, corruption et clientélisme, 2014). Par ailleurs, les tentatives pour contourner les règles et les taxes mises en place par les autorités ont favorisé le développement de la corruption dans la plupart des PED, en particulier en Inde. Néanmoins, certaines lois comme la NREGA (Loi Nationale sur la Garantie de l’Emploi Rural) ou bien la mise en place d’un programme d’aide économique à travers un système de redistribution public où les ménages ont droit à des denrées subventionnées ont été mis en place et montrent des résultats intéressants favorisant le développement. Par contre, dans les États du Nord de l’Inde où la mauvaise gouvernance est généralisée, les résultats sont plus nuancés.

Les structures politiques, sociales, culturelles et économiques de l’Inde lui confèrent une capacité de résilience.

L’État doit donc pouvoir réguler le système économique et donc le marché en particulier concernant la prise en compte de la RSE. Le marché ne peut pas tout faire. Selon les théoriciens pragmatistes tels que Luc BOLTANSKI et Laurent THEVENOT, l’incertitude des relations sociales au sein d’une institution et la fragilité de cette dernière nécessite des ajustements continus au sein des institutions et entre les institutions.

En prenant en compte le contexte indien, il faudrait donc un État transparent, bienveillant optimisant les capabilités des citoyens et de leurs institutions en limitant au maximum la corruption.

Le modèle économique actuel en Inde minimise donc le rôle que l’État peut jouer concernant les moyens octroyés à la RSE en Inde mais cela est un début.

L’Inde, pays comme étant la plus grande démocratie au monde pêche par un certain nombre de points négatifs tels que la place importante que la corruption y joue. Selon Jürgen HABERMAS, associé à l’école de Francfort, la construction d’une démocratie saine passe par la participation de tous les citoyens à la décision publique ce qui n’est pas le cas actuellement En effet, les plus pauvres ne participent pas pour le moment au débat démocratique. Cela étant notamment expliqué par un ancrage culturel fort où l’existence d’un système de castes ne permet pas aux « castes défavorisées » d’accéder au pouvoir ou même de se mobiliser pour aller voter.

La transparence institutionnelle est également le socle d’un fonctionnement éthique de l’espace publique, conception kantienne. Dans ce cadre, les institutions démocratiques correspondraient alors à une traduction organisationnelle de la volonté générale et d’une communauté de valeurs.

Comme le montre notamment le système de castes, très prégnant en Inde, il est difficile de faire évoluer un modèle culturel très ancré au sein d’un pays où les valeurs d’équité défendues ne sont pas transformées en normes communément acceptées. Certaines personnes et institutions n’ont pas forcément intérêt à voir évoluer le système existant.

La Responsabilité Sociale des Entreprises pourrait permettre de faire évoluer le système culturel des castes qui est encore un important instrument de pouvoir dans la société indienne bloquant la capacité à améliorer la société et en particulier à éliminer les injustices.

La RSE favorisée par des politiques publiques adaptées peut influencer les normes culturelles en les faisant évoluer (LIPPMANN, GEORGIEFF, SENIK, 2016).

 3. L’environnement ne détermine pas nécessairement le type de RSE mise en place

Il n’existe pas un seul type de RSE mais plusieurs, ce qui montre que l’environnement ne détermine pas à lui seul l’implémentation d’une RSE plutôt qu’une autre et c’est également le cas dans les autres pays du monde.

MARTINET et PAYAUD (2013) distinguent quatre différents types de pratiques sociales de la part des grandes entreprises indiennes (regroupant 8 % de la population active au total, The Energy and Ressources Institutes, 2015) : la RSE-BoP (1), la RSE intégrée (2), la RSE périphérique (3) et la RSE cosmétique (4).

(1) Les plus anciennes dynasties industrielles : Birla et Tata qui mettent en priorité des intérêts de la communauté. C’est un modèle de type « éthique » où l’engagement des entreprises est volontaire pour participer au bien-être de la société. Pour ces entreprises, la RSE est un moyen d’aider au développement socio-économique du pays. Cela s’apparente notamment à une RSE BoP (Bottom of the pyramid) qui indique aux entreprises multinationales de s’intéresser aux individus vivant avec moins de 2 dollars par jour selon MARTINET et PAYAUD (2013). Ce type de RSE identifié nécessite un investissement de la part des agents économiques au niveau local afin d’impliquer au mieux chaque individu dans des programmes de formation, dans le développement de modèles économiques éthiques de distribution tels que le commerce équitable ou encore dans le développement d’infrastructures, ou encore de lutte contre la corruption. L’ensemble de ces actions doivent générer des externalités positives sur le territoire concerné. Il ne s’agit pas de réaliser une seule action mais un ensemble d’actions s’insérant dans un système. Par exemple, le groupe TATA, constitué d’un conglomérat de 96 entreprises est leader en Inde concernant les questions de RSE. En 2015, 66 % des profits du groupe Tata vont à des fondations. Ceci étant, même si le groupe va au-delà des exigences légales en matière de RSE, son mode de gouvernance est plutôt paternaliste en imposant ses choix économiques au détriment de certains agents économiques tels que les salariés (COUPRY, 2008).

(2) Une deuxième famille concerne une nouvelle génération d’entreprises appliquant la RSE intégrée comme Infosys ou encore Wipro, ces dernières étant apparues avec le développement accru des nouvelles technologies et mondialisation. Ces entreprises sont très actives sur le plan de la RSE et mènent souvent des actions plus importantes que ne leur impose le nouveau cadre légal indien. Elles répondent aux besoins de l’ensemble des agents économiques que cela soit les fournisseurs, les clients, les salariés… Elles s’engagent à gouverner avec bienveillance et proposent des écolabels en prenant en compte l’ensemble des agents économiques avec qui elles ont des liens que cela soit les clients, les fournisseurs, les éventuels actionnaires, les citoyens, quel que soit leur milieu. Par exemple, ITC’s Paperboards and Specialty Papers Division propose le “Forest Stewardship Council” (FSC), certifiant que le papier proposé est recyclé. Ce logo permet aux clients d’être certains d’acheter des produits recyclés en toute confiance. Par ailleurs, elles s’appuient sur un système de gouvernance le plus transparent possible et non « factice » comparé à d’autres organisations indiennes. La RSE « intégrée » va mettre en place des outils et des dispositifs de contrôle de gestion quant à l’activité de l’entreprise assez complets tel que le sustainability scorecard proposé à l’origine par le cabinet KPMG (FIGEE et ALII, 2001). Contrairement à la RSE périphérique, la RSE « intégrée » nécessite un lien direct entre les actions de RSE de l’institution et de ses activités.

(3) La troisième famille concerne le secteur public et concerne la RSE périphérique. Ce secteur employait 18 millions de personnes en Inde en 2012 (Ministry of Labour and Employment, New Delhi, 2015) soit plus de la moitié des agents économiques travaillant dans le secteur « organisé ». La finalité est de servir l’intérêt général et les objectifs sont fixés par l’État. La RSE périphérique voit une implication plus importante des institutions concernées puisque ces dernières vont chercher à s’impliquer à travers des actions non directement liées à leur activité économique. Ces entreprises publiques se sont surtout développées à partir de 1947 date à laquelle l’Inde est devenue indépendante. Les mines, l’énergie, les transports, les communications et les banques ont été les secteurs où l’État a occupé une place prépondérante allant jusqu’à détenir 100 % des entreprises.

(4) Enfin, il y a les grandes entreprises indiennes privées utilisant une RSE que l’on pourrait qualifier de cosmétique comprenant un actionnariat international important tel que Hindustan Unilever ou ITC par exemple. Ce modèle de RSE est plutôt libéral et limité à l’actionnariat au travers des préoccupations économiques. L’important pour ces sociétés est de respecter la loi et de créer de la valeur quantifiable. Ces grandes entreprises indiennes ont développé des programmes de RSE assez complets en tenant compte de manière primordiale des intérêts économiques et en particulier par rapport aux actionnaires. Les rapports publiés chaque année vont d’ailleurs en ce sens. Concernant ce type de RSE, les agents économiques ne cherchent pas à construire forcément une relation gagnant-gagnant dans la durée. La construction de ce type de RSE peut être ponctuelle (MARTINET, PAYAUD, 2013).

 Conclusion

Le contexte particulier indien par rapport à la situation de l’emploi, des conditions de travail et du caractère très inégalitaire de cette économie donne du sens à la mise en place de la responsabilité sociale des entreprises.

Les enjeux de la responsabilité des entreprises sont nombreux pour les citoyens indiens ainsi que pour l’ensemble des institutions que cela soit au niveau des entreprises, des organisations non gouvernementales nationales ou internationales et de l’État.

La RSE devrait permettre à l’Inde et à leurs agents économiques de favoriser le développement de cette nation en réduisant les inégalités.

Malgré tout, les obstacles sont nombreux. Parmi eux, nous pouvons identifier une corruption qui gangrène ce pays tant au niveau local que national même si certains États indiens sont moins touchés que d’autres par ce fléau. Les inégalités entre hommes et femmes et entre « classes sociales » (système de castes) sont également prégnantes, comme le manque de volonté politique pour permettre à l’ensemble des indiens, surtout les plus pauvres d’avoir accès à une éducation de qualité ou tout simplement à la nourriture.

Ces contraintes institutionnelles et culturelles pourraient être dépassées à condition d’impliquer l’ensemble des parties prenantes du marché de la RSE. L’État en accompagnant la mise en place de la RSE tout en étant bienveillant doit aussi jouer un rôle régulateur accompagnant son pays vers moins d’inégalités.

La mise en place de la RSE peut aussi être un puissant moyen de réduire les inégalités extrêmes sources de tensions civiles. Comme l’a indiqué Platon (Les Lois, Ve s. av JC) : « Si un État veut éviter la désintégration civile, il ne faut pas permettre à la pauvreté et à la richesse extrêmes de se développer dans aucune partie du corps civil, parce que cela conduit au désastre. C’est pourquoi le législateur doit établir maintenant quelles sont les limites acceptables à la richesse et à la pauvreté. »

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Sitographie

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Notes

[1FAUCONNET P et MAUSS M, op.cit., p. 13

[2SELZNICK P, Leadersip in Administrations, Londres, HARPER and ROW, 1957.

[3BCSD : The World Business Council for Sustainable Development. It provides a resource base to the India offices of their member companies, enabling them to become more engaged in the work programs and products of WBCSD.

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